Le film
Un mot de la réalisatrice
TURBULENCE est un film-mémoire, mais c’est surtout une odyssée qui sillonne les courants traîtres du chagrin et des traumatismes intergénérationnels.
Il raconte comment la présence de l’absence peut devenir un lieu à remplir d’amour ; comment la perte—de nos proches, de nos familles, des lieux de notre enfance—ou le fait d’être témoin de la détresse d’autrui affecte notre perception de notre place dans le monde ; et comment toutes ces forces invisibles trouvent leur expression dans mes films.
Au cours des années passées à réaliser ce film, je n’ai cessé de me demander d’où venait l’envie de continuer. Une des réponses est qu’au cœur de TURBULENCE se trouve une question à laquelle nous sommes tous confrontés : comment vivre en paix avec soi-même et les autres après les peines, les chagrins et les traumatismes dont nous sommes victimes ou témoins ?
A propos du film
Tout commence par une chute, un pied cassé ignoré et une soudaine obsession pour la marche, malgré la douleur. Un événement à priori ordinaire, mais qui symbolise une vie passée à être le témoin et le porte-voix de personnes en proie à des situations extrêmes, afin d’éviter les effets longtemps occultés de la mort de sa mère alors qu’elle n’avait que dix ans, et du spectre de la Shoah sur son père. C’est de là que naît TURBULENCE, le nouveau film de la réalisatrice Anne Aghion (MON VOISIN MON TUEUR, ICE PEOPLE).
Enfant, la réalisatrice fait face à la mort de sa mère en refoulant tous ses souvenirs avec elle. Tout ce qu’elle a vécu jusque-là est alors balayé par une rébellion adolescente qui ira jusqu’à lui valoir des démêlés avec la justice. Adulte, elle devient une cinéaste engagée, donnant à voir comment les êtres humains vivent et survivent à l’extrême, comme après le tremblement de terre dévastateur de Managua au Nicaragua, ou dans le froid polaire et solitaire de l’Antarctique.
Surtout, elle dédiera une douzaine d’années de sa vie à la réalisation d’une série de films sur la douleur insondable des Rwandais face aux injonctions d’aboutir à une coexistence pacifique après le génocide de 1994. Ce travail, en particulier, lui vaudra de nouveaux traumatismes.
Acclamée par la critique et le public pour son travail, Anne Aghion a insisté pendant des années qu’elle allait bien, jusqu’à ce que, inévitablement, ce ne soit plus le cas.
À travers des lettres cinématographiques à cette mère dont elle se souvient si peu mais à qui elle ressemble tant, Anne Aghion retrace dans TURBULENCE une odyssée mondiale, visuellement époustouflante et parfois même saisissante, composée de films de famille, de rushes et d’extraits de ses films, d’animation d’aquarelles originales, et de nouvelles séquences tournées en Inde, en France et à New York.
Avec ce film, fruit d’une douzaine d’années de travail, Anne Aghion crée à la fois une œuvre personnelle et une histoire universelle de dépassement de la perte, en quête de résolution et de paix.
Extrait du film
« Tu sais maman, j’ai souvent voulu faire un film sur toi, enfin sur moi, sur nous, notre histoire… mais j’ai trainé. Un jour, je suis tombée. J’ai marché pendant des mois sur mon pied sans savoir qu’il était cassé, déconnectée de la douleur. Il m’aura fallu plusieurs années pour comprendre que cette fracture, je la portais en moi depuis ta mort. J’ai finalement décidé de faire ce film, pour marcher, et pour te raconter ce que ta mort m’avait fait ; ce que la mort, et tout le reste, avait fait de moi. »